La vie à bras le corps

main formant un cœur sur un fond jaune

Sylvie est porteuse d’un handicap visuel dont elle a fait une force.

Elle témoigne de son parcours, de ses difficultés, et du travail sur la frustration qui l’a aidé à entrer « au cœur de son humanité ».

Sylvie est porteuse d’un gêne associé à une maladie dégénérative qui se manifeste par un rétrécissement du champ visuel.

Elle est considérée comme aveugle. « Sur le papier » comme elle dit, elle est handicapée à 100 %. Pourtant, malgré la découverte du diagnostic à l’âge de 18 mois et un champ visuel très limité, sa vue diminuée s’intègre naturellement à son quotidien.

« À 4 ans j’étais sur les skis alpins. J’ai été toujours suivie dans des écoles tout à fait ordinaires. Donc j’ai côtoyé toujours le monde ordinaire, avec cette sensation évidemment sans doute que je n’étais pas tout à fait ordinaire, mais enfin, ça, tous les êtres humains aiment ne pas l’être ou tout du moins sont confrontés à ça. »

Intégrer le handicap

Petite fille, ses parents l’aident à oublier qu’elle ne voit pas, ou presque pas.

Choix de ses vêtements, perception des couleurs, sensibilité à l’art… longtemps, la famille de Sylvie a tenu un rôle important dans son développement personnel et son ouverture sur le monde. Sylvie explique que son père prenait l’habitude de lui décrire les choses, un tableau au musée, ou un oiseau par la fenêtre par exemple.

« Mon père m’a toujours énormément décrit des choses. C’est pour ça que je croyais toujours que je voyais. Est-ce que je le voyais vraiment ? J’ai le souvenir que je voyais une ombre. Et puis mon père me décrivait l’oiseau, une mésange par exemple, et du coup j’avais vraiment l’impression de voir. »

Encore maintenant, elle a le sentiment de voir et ressent un décalage entre la richesse de ce qu’elle perçoit et l’évaluation de son état d’après les critères de référence d’un examen de la vue.

Déficience visuelle : quotidien et difficultés

Pour Sylvie, « ce qui est le plus difficile, c’est au niveau de la relation. » Son handicap l’empêche parfois d’avoir une relation simple et directe avec les personnes qu’elle rencontre.

La difficulté c’est d’avoir l’impression d’être trop visible, d’encombrer, de prendre trop de place, avec une canne blanche ou avec un chien guide. Or, pour pouvoir se déplacer seule librement, l’un ou l’autre lui est indispensable. Un constat qui amène Sylvie à une conclusion : « Je crois au fond que je ne veux pas qu’on s’occupe de moi en fait ! ».

Y compris dans ses relations amoureuses. « Je me suis toujours arrangée au début pour me trouver des amoureux qui étaient plutôt un peu tournés sur eux-mêmes et qui s’occupaient le moins possible de moi. La première personne avec qui j’ai vraiment habité à deux, c’est celui qui est devenu finalement mon mari. Mais je l’ai rencontré quand j’avais presque 40 ans.»

Faire de la cécité un atout

Même si cela peut sembler étonnant, pour Sylvie, ce handicap l’aide à avancer dans la vie. « Je n’ai pas encore rencontré de personnes qui n’avaient pas de handicap, c’est à dire de difficultés dans la vie ou de marches à franchir. »

Grâce à la méditation, elle apprend à travailler avec le manque et la frustration, qui sont, pour elle, des « thèmes humains avant tout ». Devant une œuvre d’art par exemple. « J’ai tellement le désir de voir que je reste devant le tableau, je fais un effort, et puis je me dis : non ! il faut que tu lâches, c’est la frustration qu’il faut vraiment rencontrer

POUR ÉCOUTER LE TÉMOIGNAGE COMPLET DE SYLVIE, C’EST ICI :