Thérapie de la douleur
Face à quelqu’un qui souffre, il est difficile d’être dans une pure écoute du ressenti de l’autre, même pour le médecin face à son patient.
Les peurs projetées concernent la douleur et non la personne qui souffre. Bien involontairement, nous interprétons, nous entendons au travers de notre propre histoire, notre culture, notre éducation, nos certitudes, nos peurs…
Clémentine, Praticien Hospitalier dans un service d’oncologie, est très concernée par cette question.
Le rôle du médecin est de faire preuve de neutralité. « Le médecin doit offrir une page vierge à son patient pour recueillir tout ce qui résonne par rapport à son mal-être : expérience sensorielle, physique, psychologique. C’est ce qui permet d’apporter une réponse en essayant de faire abstraction de notre expérience personnelle et professionnelle et, dans tous les cas de ne pas projeter nos propres peurs face à la personne soignée. »
L’ÉCOUTE QUI SOULAGE
Beaucoup de personnes soignées, tout en reconnaissant la qualité et la technicité de la prise en charge médicale dont elles bénéficient, se plaignent que leur douleur n’est pas suffisamment entendue, voire même parfois négligée.
Clémentine fait quotidiennement l’expérience que l’accompagnement et l’écoute jouent un rôle majeur pour trouver le chemin du soulagement. « Parfois, on n’a pas de solution, mais offrir du temps, se rendre disponible, acter et reconnaître la douleur psychique par ce temps accordé, cela peut suffire. »
Elle déplore que tout tourne autour de la prise de médicament plutôt qu’autour du ressenti du patient. « On entre dans un système où le médicament devient la priorité, le seul enjeu de la discussion : Est-ce que vous avez pris votre comprimé ? Est-ce que deux soulagent mieux qu’un ? Est-ce qu’un demi ne suffirait pas ? »
Pour elle, l’essentiel réside dans le temps accordé à la personne et l’espace d’écoute instauré. « S’il suffisait de prescrire un antalgique, ça se saurait et les gens n’auraient plus mal. »
PERCEPTION DE LA DOULEUR SELON LES CULTURES
À l’âge de 21 ans, Clémentine part pour une mission humanitaire en Inde, dans une léproserie à 40 km au Nord de Calcutta. Elle est chargée des soins et de l’accompagnement pour améliorer la qualité de vie des patients amputés.
Même si la lèpre entraîne une lésion des nerfs qui empêche de ressentir la douleur, l’amputation engendre des douleurs. Néanmoins, les conditions étant très précaires, les patients ne recevaient ni anesthésie ni antalgique.
À sa grande surprise, Clémentine constate, lors des nombreuses interventions auxquelles elle a assisté, que les patients savent se placer dans une sorte de « transe méditative » qui empêche la douleur.
«On est loin de la situation de peur, d’angoisse, de handicap, de crainte des complications. En fait, le geste prend tout son sens et, du coup, l’interprétation est totalement différente. »
Cette expérience en Inde a changé le regard de Clémentine sur la médecine et sur la personne malade. Elle lui a montré aussi le fossé avec l’approche occidentale où le médicament est mis au centre.
Aujourd’hui, en plus de son activité professionnelle dans le service d’oncologie d’un hôpital parisien, Clémentine contribue à faire vivre une structure dont elle est co-fondatrice.
Entourée de professionnels qualifiés et tous bénévoles, cet espace d’accueil de personnes touchées par un cancer offre des soins complémentaires aux traitements médicaux et chirurgicaux : méditation, hypnose, mais aussi activités créatives, soutien social et psychologique.
Une belle façon de prendre soin des personnes dans leur globalité !
POUR ÉCOUTER LE TÉMOIGNAGE COMPLET DE CLÉMENTINE, C’EST ICI :