Émotions : questions de parents et d’enseignants

 

Votre livre « Grandir avec ses émotions » est-il applicable à des enfants entre 2 et 3 ans ?

Ce livre s’adresse avant tout à tous les adultes qui souhaitent comprendre le fonctionnement des émotions et la façon de réagir pour éviter l’escalade émotionnelle.

J’ai consacré toute une partie à donner des repères pour comprendre :

  • ce qui les caractérise les émotions à tout âge
  • comment elles fonctionnement selon l’âge
  • les éléments qui permettent de comprendre qu’il existe une maturité émotionnelle et que nous ne pouvons pas demander aux enfants ce qu’ils ne sont pas en capacité de comprendre ou de contrôler.

La partie pratique du livre, avec des exercices, des conseils très concrets pour aider les enfants à traverser leurs émotions peut être adaptée pour les plus jeunes.

Les séances enregistrées sont plutôt destinées à des enfants à partir de 5/6 ans.

Michal K. : J’ai une petite princesse qui parfois entre dans une hystérie hallucinante qui dure de longues minutes et impossible de la calmer ! Elle devient une véritable tornade ! Je voulais savoir quels conseils vous pourriez nous donner à ce sujet ? Comment faire pour la calmer ?

Dans les contes de fées les princesses sont toujours d’humeur égale, posées, calmes, elle ne s’énervent jamais. Mais ce n’est pas le cas dans la vraie vie !
Hystérie est un mot un peu fort pour qualifier la tornade dont vous parlez, même s’il est impossible de la calmer, vous le dites très justement.
L’image de la tornade aide à comprendre la force de l’émotion et combien il est vain de vouloir lutter contre elle.
Cette image aide aussi à comprendre l’inconfort, on peut même parler de douleur, de votre petite fille lorsqu’elle est traversée par cette émotion.
Une émotion fait souffrir, et l’enfant n’a pas la maturité émotionnelle ni les éléments de compréhension que nous avons. Les pics émotionnels sont donc naturels, compréhensibles et inévitables.
La faculté de régulation des émotions se fait progressivement, jusqu’à l’adolescence.

Mon premier conseil est de ne pas essayer de la calmer, car elle ne peut rien contrôler, et de l’aider à s’apaiser.
Essayez d’agir comme vous le faites lorsqu’elle se fait mal physiquement, qu’elle tombe par exemple.
Mettez-la en confiance, soyez présent sans jugement, rassurez-là par votre présence et votre accueil bienveillant.
Évitez donc toute analyse, tout jugement ou toute explication.

Nathalie A. : Comment réagir vis-à-vis d’une petite fille de 6 ans qui est très jalouse de sa sœur, et qui veut tout ce qu’elle a, voire plus ?

Cette émotion est sans doute la plus irrationnelle.
Elle est associée aux rapports humains.

Dès le plus jeune âge, dans les fratries, c’est très presque inévitable !
Elle submerge l’enfant malgré lui en voyant chez l’autre ce qu’il pense qu’il n’a pas.
Il compare ce qu’il a. ce qu’à son frère ou sa sœur, et se sent toujours lésé.
Pour les parents c’est souvent incompréhensible et surtout très contrariant.

Mais comme pour toute émotion, le mieux d’accueillir le phénomène sans jugement.

Plutôt que de chercher à convaincre l’enfant du caractère non fondé de sa jalousie, et de lui en faire reproche, c’est l’occasion de lui apprendre la bienveillance envers lui-même et de lui expliquer l’absence de limites de l’affection de ses parents, de lui faire découvrir sa singularité, de lui parler de ses qualités propres pour qu’il trouve sa place dans la fratrie.

Isabelle C. : Je suis enseignante en CP et ma question est la suivante : Comment mettre en place des séances de méditation en classe pour aider les enfants à accueillir leurs émotions ?

C’est une bonne idée !
D’abord parce que l’école joue un rôle capital dans l’éducation des enfants, quel que soit l’environnement familial, parfois difficile.
J’explique dans mon livre combien la méditation constitue une voie d’éducation pacifiste et bienveillante, avec des pratiques simples à mettre en œuvre.

Pour initier les enfants à la méditation, il est indispensable d’expérimenter vous-même la pratique pour partager votre expérience.
Dans une classe ou un groupe je conseille des séances courtes.
Le temps n’est pas un gage de réussite. Rester présent une ou deux minutes à 4-5 ans, c’est déjà très long.

Le simple fait d’être ensemble en silence dans la classe avant de commencer une leçon a une influence très positive sur la qualité d’attention des élèves.
Vous pouvez tenter l’expérience avec le CD joint à ce livre, ce qui vous permet de vous inclure dans la séance.

Insistez bien sur le fait qu’il n’y a rien à réussir, ni aucune évaluation.
S’ils s’imaginent qu’ils vont être évalués, la méditation peut rebuter les enfants.
C’est important de ne pas faire de remarques si vous estimez que l’enfant manque de discipline ou de concentration.
C’est un moment où les adultes suspendent leurs injonctions, où il n’y a rien à mettre en œuvre pour progresser et s’améliorer.

Dans la méditation, on regarde comment le phénomène se produit, sans recherche d’explications.
C’est l’inverse de la réaction habituelle de chercher à expliquer et à dominer l’émotion.
Être pleinement attentif et bienveillant à la façon dont se déroule l’émotion constitue un chemin d’apaisement.

Sophie M. : Comment mettre en place des moments de relaxation avec des adolescents collégiens souvent réfractaires aux idées des adultes, et les aider à surmonter leurs colères et leurs tristesses ?

La relaxation nous met en relation directe avec nos sensations corporelles. Pour de nombreux jeunes, c’est source de pudeur, voire de complexes pour certains.
Mon conseil, avec les adolescents, est de proposer la relaxation dynamique, qui se pratique debout et qui permet, en fin de séance, de trouver les ressources positives qui aident à apprivoiser les émotions.
Je décris cette technique dans plusieurs ouvrages, avec des séances enregistrées.
Écrivez-moi si vous voulez les références précises.

Pensez aussi, en fin de séance par exemple, à partager des lectures qui mettent en scène des émotions dans la littérature ou qui les amèneront à une réflexion philosophique !

Catherine C. : Maman d’un enfant de 10 ans hyper sensible-précoce, je voudrais savoir comment l’amener à mettre un mot sur les émotions ressenties (frustration, colère…) afin que nous puissions ensuite l’aider…

Reconnaître et mettre en mots ce qu’on ressent n’est pas chose facile, même pour les adultes dont le vocabulaire est plus fourni que celui des enfants.
Je vous conseille donc de verbaliser vous-même la situation, le plus simplement et clairement possible : « Je vois que tu es en colère, que tu es triste, que tu es vexé, etc. », sans demander d’explication ni faire aucun commentaire.
Vos mots aideront l’enfant à reconnaître son mal-être et à sentir votre aspiration à lui venir en aide.

Et lorsqu’il s’en veut d’être en colère, vexé ou intimidé par exemple, et qu’il l’exprime par des paroles telles que « Je suis nul» ou « Quel imbécile», il est important de le rassurer pour éviter, avec douceur, ces agressions verbales.

Veillez aussi de votre côté à prêter une attention particulière au vocabulaire que vous employez au quotidien.
Cette vigilance fait partie des éléments de fond pour entretenir une bonne santé émotionnelle.
Je propose dans mon livre différents exercices très simples pour que les enfants prennent conscience de l’impact du langage.

Le_7eme_doudou : Pourquoi mon fils est survolté en sortant de sa journée en petite section, dur de le centrer sur une activité, j’ai l’impression qu’il est plus violent, autoritaire… On a un petit chef à la maison depuis 2 semaines, pourquoi ?

L’enfant apprend en grande partie en observant et en imitant les comportements de ceux qui l’entourent, enfants et adultes.
Si vous avez remarqué un changement récent de comportement, il me semble important de vous renseigner sur la façon dont se passent les journée à l’école et d’en parler avec son maître ou sa maîtresse.